La position dominante de Google sur le marché de la publicité en ligne inquiète le Surveillant des prix
Dans un rapport sur le marché suisse de la publicité en ligne, le Surveillant des prix Stefan Meierhans tire des conclusions drastiques : la position dominante de Google sur le marché peut conduire à des problèmes de concurrence. Des comportements abusifs ne peuvent pas être exclus, c’est pourquoi il continuera à surveiller la situation de près. L’ASM demande que cette situation inquiétante soit contrée par une réglementation ciblée.
Le Surveillant suisse des prix, respectivement l’Office de la surveillance des prix OSP, rattaché au Département de l’économie, de la formation et de la recherche DEFR, a publié hier le rapport « Résultats de l’enquête sur la publicité en ligne en Suisse ». Il en ressort clairement que l’économie suisse dépend de Google sur le marché de la publicité en ligne. Le Surveillant des prix y voit des problèmes du point de vue de la concurrence et n’exclut pas un comportement abusif : « Google peut finalement dicter assez librement les conditions du marché », estime-t-il.
Le rapport considère que le pouvoir de marché de Google est particulièrement problématique en termes de transparence et de dépendance. Dans le domaine de la recherche sur le web, Google détient en Suisse une part de plus de 90 %. A cela s’ajoute une position marquante dans toute la chaîne de transactions du marché de la publicité en ligne : les effets de réseau, l’association de plusieurs produits et les barrières à l’entrée dues à l’énorme stock de données en possession de Google cimentent sa forte position sur le marché publicitaire. « Les avantages de Google rendent l’émergence de la concurrence pratiquement impossible. Une très nette majorité des entreprises interrogées a indiqué qu’il n’y avait pas d’alternative comparable à Google sur le marché publicitaire », indique le Surveillant des prix dans son rapport.
La position dominante de Google est particulièrement problématique pour les médias
Comme l’explique encore le Surveillant des prix, la position forte de Google dans l’ensemble de la chaîne de création de valeur du marché publicitaire en ligne place en particulier les médias suisses dans une situation problématique, ce qui pourrait finalement conduire à un affaiblissement de l’offre médiatique suisse et à une réduction de la diversité des médias. D’une part, les entreprises de médias perdent des recettes publicitaires au profit des plateformes technologiques mondiales. D’autre part, elles sont elles-mêmes dépendantes de Google pour générer du trafic et du chiffre d’affaires et pour utiliser des services d’analyse. Un manque évident d’alternatives peut conduire à ce que Google, en tant qu’intermédiaire, s’attribue une grande partie des dépenses publicitaires (donc moins va aux entreprises de médias) et à ce que des comportements anticoncurrentiels se produisent, explique le Surveillant des prix. Mais la forte position de Google sur le marché de la publicité en ligne ne permet plus aux concurrents de se battre à armes égales. Cela crée pour les entreprises de médias une dépendance à l’égard de Google qui peut comporter différents risques. Dans le domaine de la recherche, par exemple, elles dépendent du fait que leurs contenus soient trouvés par les utilisateurs. Le problème est que les contenus sont certes trouvés via Google, mais que les plateformes des médias ne sont ensuite pas visitées, selon les conclusions du Surveillant des prix.
Selon le Surveillant des prix, le manque de concurrence sur le marché de la publicité en ligne pourrait avoir des conséquences pour les consommateurs et le bien-être des producteurs. De son point de vue, celles-ci devraient être combattues en premier lieu par de nouvelles réglementations. Mais en comparaison internationale, la Suisse est hésitante en ce qui concerne la régulation des grandes plateformes, résume le Surveillant des prix. Il s’attend à ce que l’importance de Google pour le marché publicitaire augmente encore dans un avenir proche, ce qui accroît le risque de surprofits croissants pour Google. C’est précisément pour cette raison et en raison du manque de transparence élevé dans le système programmatique de Google qu’il n’est pas exclu qu’un comportement abusif puisse apparaître. Le Surveillant des prix reste donc vigilant et transforme le dossier en une observation permanente du marché.
Le rapport confirme le besoin de régulation
Pour l’association des éditeurs SCHWEIZER MEDIEN VSM, les conclusions du Surveillant des prix confirment qu’il est urgent d’agir. La VSM demande que la problématique soit abordée par une régulation ciblée. Un élément central à cet effet est ce que l’on appelle le droit voisin, qui protège mieux les contenus journalistiques et conduit à un équilibre équitable entre les géants de la technologie et les entreprises de médias. En outre, il demande que l’utilisation des contenus médiatiques par des applications d’intelligence artificielle, comme par exemple les chatbots ChatGPT ou Google Bard, soit également protégée. Sinon, la dépendance de l’ensemble de la société vis-à-vis de Google & Co. sera si grande que non seulement la liberté économique et la diversité des médias, mais aussi notre démocratie seront en danger.